«Résistance !»  s’invente des accointances avec les écologistes. Pourtant, il suffit de tomber sur leurs tee-shirts et autocollants pour ne plus douter de leurs idées.

 

Si l’habit ne fait pas le moine, il permet quand même d’en savoir un peu plus sur sa religion. Pour l’extrême-droite, c’est pareil. Le groupe Résistance ! diffuse un catalogue 1 éloquent : «Des tee-shirts de choc pour des hommes extrêmes». Ce groupe, issu de Nouvelle Résistance, lui même scission du mouvement Troisième Voie («ni soviets, nitrusts, révolution européenne») de Jean-Gilles Malliarakis, regroupe une centaine de militants qui, après avoir fusionné avec les étudiants du GUD au sein de Unité radicale, cherche inlassablement à constituer un «Front anti-système» : fachos, écolos radicaux, ultra-gauche. Une série d’autocollants illustre ainsi sa tentative d’attirer l’extrême-gauche : dénonçant d’une même voix les mac-dos, l’impérialisme américain et le sionisme pour soutenir l’intifada palestinienne. Un autre autocollant illustre le penchant de Résistance ! pour le discours écologiste radical (qui valu aux jeunes Verts d’être infiltrés par ces messieurs en 1991). Un sticker de Résistance Verte (leur cache-sexe écolo) porte ce slogan : «Le système détruit la nature, détruisons le système pour défendre la nature». Le reste du catalogue montre que derrière ce mélange des genres (droite/gauche, vert/brun), se cache bien plus simplement un groupe fasciste, xénophobe, fleurant l’antisémitisme. Pêle-mêle : des tee-shirts à la gloire de la Légion étrangère, de l’OAS ou représentant des rats (symboles du GUD) déguisés l’un en membre du Klu Klux Klan, l’autre en skin avec comme slogan «White power». Il y a des tee-shirts de Thor et Odin, d’un guerrier viking à cheval et même de Che Guevarra avec une croix celtique sur le béret. Slogan : «Europe, jeunesse, révolution». Sur deux autocollants, le SCALP REFLEX et Ras L’front sont traités de «flics de la pensée» et Gud Jeune Résistance invite ses adhérents : «claquons leur la gueule». Quelques filons sont exploités avec une certaine constance. D’abord, les amis de l’Est. Un tee-shirt est ainsi édité qui reprend une affiche du Parti de l’unité nationale russe, que les correspondants du SCALP/REFLEX en Russie décrivent comme un parti antisémite, le plus nombreux et le plus organisé. Se définissant lui-même comme national-socialiste, il organise chaque année des camps d’entraînement militaire qui permettent à ses adhérents en uniformes noirs ou kaki de briller dans les bagarres de rue... Un autre tee-shirt présente un milicien du défunt HOS-Ustacha, groupe qui s’illustra particulièrement par ses horreurs pendant la guerre des années 90 en ex-Yougoslavie avant d’être éliminé par l’État croate. Ce groupe armé du Parti du Droit croate revendiquait la filiation avec les Ustachis, fascistes croates des années 30...


Astérix et Obélix pris en otages
Plus près de nous, l’histoire de France est également à l’honneur en particulier quand il s’agit de repousser des invasions étrangères. Si Jeanne d’Arc est une habituée des récupérations, c’est plus nouveau pour Vercingétorix ou Astérix et Obélix. Ils sont pourtant détournés sur plusieurs tee-shirts : en skin-heads avec le slogan «La Gaule aux Gaulois» ; sous «Gaulois et fier de l’être», Astérix arbore un badge «J’aime Le Pen» et Obélix porte une flamme tricolore en guise de Menhir. Si on n’avait pas compris qui n’est pas assez “gaulois” pour Résistance !, il suffit de se référer au tee-shirt «Poitiers 732, chassons-les» ou à un autocollant de Jeune Résistance montrant un homme noir en djellaba avec ses quatre femmes et sa trentaine d’enfants sous le slogan : «Exigeons l’expulsion de tous les sans-papiers». Plus les références historiques sont récentes, plus l’affichage fasciste, voire national-socialiste est clair... Et la limite de la légalité frôlée. Ainsi, un tee-shirt à la gloire des «corps-francs de la Baltique» qui éliminèrent Rosa Luxembourg et les spartakistes à Berlin en 1919 et servirent de base à la création du parti nazi en Allemagne. Un autre à la gloire de Julius Evola, philosophe italien d’origine argentine, qui poussa le fascisme italien vers les théories racistes. Un troisième - très frais - montre un rapport sexuel entre un rat (portant un brassard à croix celtique) et une rate avec la légende suivante : «Le fascisme passera-t-il ? Je sens que ça vient !». Sont vendues des épinglettes de Mussolini et de «Léon Degrelle sur le front de l’est» (fondateur du rexisme dans les années 30, collaborateur belge réfugié après guerre dans l’Espagne de Franco), des brochures  sur «les principes de l’action fasciste», «l’avenir des Aryens» et un «essai de synthèse pour un néo-fascisme». À signaler également : une épinglette du Front de Libération Nationale Corse...

À la limite de la légalité
Pour finir, deux cerises sur le gâteau. Un autocollant de GUD-Jeune Résistance : «Si vous ne supportez plus leur arrogance. Si vous ne supportez plus leurs mensonges et leurs calomnies. Si vraiment vous en avez marre de recevoir des leçons de la part de ces escrocs assoiffés de pouvoir... Alors faites comme Astérix : réagissez en bon Gaulois» et l’on voit Astérix envoyer dans les cieux d’un direct du droit un homme qui laisse au sol les tables de la loi, un chandelier à sept branches et un chapeau noir de juif orthodoxe... Enfin, tout aussi inquiétant, un tee-shirt nous présente un des rats du GUD déguisé en waffen SS et surmonté de «Charlemagne» en lettres gothiques, référence à la Division Charlemagne qui rassemblait des collaborateurs français partis se battre avec les nazis sur le Front de l’Est... Les auteurs de ces babioles ont bien sûr pris leurs précautions pour se protéger d’un point de vue judiciaire. Certaines frôlent, selon une juriste du MRAP la «provocation à la discrimination». Mais comme tout est allusif (références à l’histoire, attributs vestimentaires flous) et qu’aucun groupe n’est jamais nommément cité (“les Juifs”, “les Arabes” par exemple) tout dépendrait alors du magistrat jugeant l’affaire. En revanche, certaines productions pourraient tomber sous le coup de l’article R645A qui punit la présentation ou l’exhibition publique d’uniformes ou emblèmes d’organisations condamnées par le tribunal de Nuremberg (l’autocollant sur la waffen SS par exemple). Autre problème : une publication ne peut être poursuivie que dans les trois mois qui suivent sa parution et le catalogue - opportunément - ne porte pas de date... Il n’est pas dit pour autant que le MRAP en reste là.

Norbert Gamotte


1 Ce catalogue est diffusé par “ARS-Magna” dont la boite postale à Nantes est la même que celle du journal Résistance !. (retour)



 
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